Gatineau Loppet 2022

Tout d’un coup, j’étais étourdi, et je me suis effondré par terre. Ça m’a surpris…

À l’automne 2021, tout semblait bien progresser. Le nombre de cas diminuait sans cesse, les impacts de COVID diminuaient progressivement. Au début de l’hiver je me suis inscrit à la course de 50 kilomètres de ski de patin de la Gatineau Loppet 2022. Ça serait ma troisième participation officielle (si on ne compte pas l’édition « virtuelle » de 2021, où les participants étaient libres de faire la distance sur un parcours qui de leur choix). C’était la première fois que je m’y inscrivait plus de 5 jours avant l’événement. Habituellement j’attendais à la date limite d’inscription parce que je suis frileux (particulièrement par les standards des skieurs les plus mordus) et j’ai peur de me geler trop sérieusement des doigts et des orteils… mais cette fois j’étais assez confiant que je pourrais survivre peu importe les conditions.

Puis le nombre de cas de COVID s’est mis à ré-augmenter. Pendant un certain temps on a douté que la course puisse avoir lieu, et les organisateurs ont fait un excellent travail pour transmettre l’information sur les plans potentiels, et malgré tout il était toujours jugé sécuritaire que l’événement ait lieu, au grand plaisir des skieurs. C’est plutôt dame nature qui n’a pas collaboré cette année. Des faibles précipitations, combinées à un réchauffement et de la pluie quelques jours avant l’événement, on forcé une modification du parcours, qui a été raccourci à 47 kilomètres et changé d’un parcours linéaire à une boucle avec un départ et une arrivée au même point, soit au relais plein-air de Gatineau. Malgré ces imprévus, j’était très content que l’événement puisse toujours avoir lieu.

Il y a plusieurs vagues de départ, de la A (les élites) à la E (les plus lents). Je me suis beaucoup amélioré dans les dernières années, mais bien que j’avais demandé à partir dans la vague B, j’ai été placé dans la vague C (la décision est prise en fonction de mon temps de qualification sur ma participation à l’édition de 2020).

Moi (2401) et François( 2407) sur la ligne de départ de la vague C.

Puisque je prévoyais être plus rapide que la majorité des gens dans ma vague de départ, j’était content de réussir à me placer sur la première ligne pour le départ. Mon ami François était à mes côtés, et il avait aussi fait la course de 50 kilomètres de ski classique la veille!

Après une courte montée et un passage de quelques kilomètres sur une promenade large, il y avait ensuite plusieurs kilomètres du parcours sur des sentiers forestiers assez étroits. J’ai donc fourni un assez gros effort pendant les premiers 10 kilomètres afin de ne pas me retrouver derrière un train de participants plus lents que moi une fois dans les sentiers plus étroits. En fait, c’est moi qui a laissé passer quelques coureurs plus rapides que moi, un d’entre eux ayant d’ailleurs mis son ski sur mon bâton, heureusement mon bâton n’a pas brisé mais le panier (l’anneau qui s’appuie sur la neige au bout du bâton) a crochi, mais au moins il est resté en place. J’essaie d’être gentleman en course, mais je comprends que l’état d’esprit compétitif peut parfois prendre le dessus et qu’il est important de ne pas perdre de vue nos concurrents quand on a la capacité de les suivre.

J’ai eu un petit groupe de 5 skieurs qui s’éloignaient progressivement devant moi entre le début de la piste #15 et l’arrivée a la grosse montée du parcours, la « Pingouin », sur la piste #1. Les montées raides étant mon point faible, j’ai perdu de vue les concurrents devant moi et j’ai géré l’interminable montée pour simplement « survivre » jusqu’au sommet. Tout en haut, un autre participant m’a rejoint, puis dépassé, mais puisque la montée était terminée (enfin!), je l’ai redépassé après quelques mètres à peine puisque ma vitesse est généralement plus élevée sur le plat et les portions ondulées.

J’ai fait un arrêt bref, que je considère efficace, au ravitaillement près du refuge Keogan. On a rempli ma gourde pendant que j’ai pris un gel avec de la caféine pour m’aider à rester vif et concentré malgré la fatigue qui commençait à se faire sentir après 25 kilomètres.

Mes jambes étaient de plus en plus lourdes, mais celles de mes compétiteurs aussi, on était tous dans le même bateau. J’était surtout content d’avoir fini les plus grosses montées. Plus je fais des longues activités, plus j’apprends à mieux juger de mon niveau d’énergie, et je pensais que, bien qu’il me restait des portions de sentiers ondulés assez exigeants, je pourrais continuer à maintenir un niveau d’effort relativement constant jusqu’à la fin. Ou du moins je l’espérais.

En me rapprochant du Belvédère Champlain je me rapprochais d’un participant, et je l’ai assez rapidement rejoint puis dépassé. Puis, un peu plus loin, en m’approchant du Mont King, il y a un long faux-plat, et j’y ai rattrapé 2 participants qui montraient des signes de fatigue et que j’ai dépassé en les encourageant à tenir bon, leur disant qu’il restait majoritairement à descendre. Ma fatigue augmentait, mais il me restait maintenant moins de 20 kilomètres à parcourir, ou l’équivalent d’une de mes sorties de fin de journée après le travail – j’étais de plus en plus confiant que je pouvais maintenir le rythme.

En passant près du domaine MacKenzie-King il y a un autre faux-plat assez long. Un autre coureur a été relégué derrière moi. Ensuite le trajet arrivait que la promenade de la Gatineau, une portion du trajet partagée pour les parcours de 27 et 47 kilomètres. Je voyais des coureurs, mais bien que les dossards aient été de couleurs différentes pour les participants aux 2 distances, je commençais à avoir de la difficulté à les différencier : la fatigue était définitivement trop élevée à mon goût. J’ai encore dépassé un autre participant, et je me mon disais simplement que le plus rapidement je pouvais finir, le plus tôt l’inconfort prendrait fin (ce qui n’était pas vraiment exact…). J’avais hâte d’arriver à la ligne d’arrivée puisque je sentais que je ne pourrais plus tenir très longtemps. J’étais encore capable de me concentrer pour skier à un bon rythme, avec une bonne technique, c’était bon signe.

Bien qu’il n’y avait aucun autre participant près de moi dans le dernier kilomètre, j’ai toujours maintenu un rythme aussi rapide que je le pouvais, mon but étant de faire le meilleur temps possible. Du coin de l’œil j’ai vu 2h58 quand j’ai franchi l’arche à la ligne d’arrivée. Je me suis appuyé les mains sur les jambes pour (enfin!) reprendre mon souffle, puis tout d’un coup, j’étais étourdi, et je me suis effondré par terre. Ça m’a surpris… incertain de ma condition, on m’a mis des couvertures sur le dos pendant quelques instants. Il m’a fallu quelques minutes pour retrouver mon souffle et l’équilibre pour me relever.

J’ai terminé 76e sur 292 participants, avec un temps de 2h58m27s de loin mon meilleur résultat. L’inconfort n’a pas pris fin à la ligne d’arrivée, contrairement à ce que mon était fatigué et confus m’a porté à croire pendant la course… en matinée le lendemain j’avais des bonnes douleurs, mais j’ai quand-même accepté une invitation pour une sortie de ski à un rythme très modéré en fin de journée. On aura finalement parcouru 20 kilomètres. Peut-être que mon corps peut récupérer rapidement, ou suis-je un junkie d’endorphines? Il y a probablement un peu des deux.

Ça tourne… je suis tellement de bien d’être couché par terre…
(je ne me souvient pas avoir eu connaissance qu’on m’enlève mes skis)

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